Pierre BERTHIER (1782-1861)

Né à Nemours le 3 juillet 1782, mort le 24 août 1861 ; il avait été retraité comme Inspecteur général des Mines de 2e classe en 1848.

Entré à l'Ecole Polytechnique en 1798 et à l'Ecole des Mines en 1801, il avait été de cette promotion de 1801 de l'Ecole qui, après un an d'études à Paris, dut aller achever son instruction à Moutiers; il y resta élève jusqu'en 1805, puis six mois comme ingénieur attaché à la direction de l'Ecole.

Il travailla ensuite au laboratoire central du Bureau des Mines. En 1816, il fut nommé Professeur de Docimasie et chef du Laboratoire de l'Ecole des Mines (voir Notice historique sur l'Ecole des Mines, chapitre 6), et il conserva ses fonctions jusqu'en 1845, tout en étant suppléé comme professeur par Ebelmen depuis 1840. Membre de la section de Minéralogie de l'Académie des Sciences le 16 juillet 1827, il fut nommé Inspecteur Général des Mines en 1836.

L'oeuvre de Berthier surprend par sa diversité (il fut l'auteur de plus de 150 publications). Ses travaux se répartirent entre la minéralogie, la géologie, la chimie, et intéressèrent autant les applications industrielles que la recherche fondamentale: c'est ainsi que la science et l'industrie lui sont redevables d'un grand nombre de découvertes, et que la plupart de ses études, en minéralogie notamment, concernèrent plus particulièrement les minéraux "utiles". Il publia en 1834, son fameux "Traité des essais par la voie sèche, ou, des propriétés, de la composition et de l'essai des substances métalliques et des combustibles", très utilisé par les minéralogistes et les ingénieurs des mines, grâce à un traitement didactique et pratique des méthodes analytiques. En dehors de ce Traité, qui était le couronnement de son enseignement, l'oeuvre ininterrompue de Berthier consiste dans une série d'analyses, méthodiquement exécutées, dont il adonné les résultats dans les Annales des Mines. Ces analyses ne valaient pas seulement par la détermination immédiate de la composition des substances sur lesquelles elles portaient, elles prenaient une importance plus grande par les vues qui avaient dirigé Berthier et les déductions qu'il en tirait.

Les minerais de fer occupèrent une place importante dans ses recherches: il fit une étude très approfondie de la composition de ces minerais en France afin d'en améliorer les procédés de traitement et la métallurgie; ceci lui permit accessoirement de préciser la nature du "fer carbonaté" autrefois appelé "fer spathique" et de découvrir en 1820 une nouvelle espèce minérale, la chamoisite (dénommée ensuite chamosite). D'autres minerais et minéraux non ferrifères furent analysés par Berthier, il montra par exemple la présence d'eau de cristallisation, niée jusqu'alors dans le "zinc silicaté" (L'hémimorphite). Il insista sur la nécessité de bien distinguer les espèces minérales des mélanges qui en faussaient souvent l'analyse.

Les minéraux des argiles furent l'objet de multiples travaux de la part de Berthier, en raison de leur importance industrielle; il décrivit à cette occasion deux nouvelles espèces, l'halloysite en 1826 et la nontronite en 1827. Un des premiers à étudier la décomposition des roches silicatées, il décela (en 1821) la présence d'alumine dans le minerai des Baux près de Tarascon, qui en raison de sa couleur, avait été jusqu'alors considéré comme un minerai de fer "difficile à traiter". Ce minerai fut ensuite appelé "beauxite" par Dufrénoy (1844) puis reçu son nom définitif: bauxite de Deville en 1861. Signalons que Berthier a réalisé de nombreux travaux sur les minerais de cuivre, de mercure, les combustibles fossiles... On lui doit la découverte et la description de la franklinite ; enfin à Chazelles (Puy-deDôme) il signala un sulfure de fer et d'antimoine qu'il nomma haidingérite en l'honneur de Haidinger, ce dernier demanda d'ailleurs par la suite que ce minéral fut dédié à son découvreur d'où la berthiérite. Enfin dans un autre domaine, Berthier avait remarqué, bien avant les travaux de Mitscherlich sur l'isomorphisme que des substances chimiquement différentes peuvent avoir la même forme cristalline et même syncristalliser, et il commença une série de synthèses de carbonates, expériences qui furent reprises plus tard avec succès par de Sénarmont.

Par ses essais, Berthier a provoqué de grands progrès dans la Minéralogie et la Géologie, soit en signalant des espèces nouvelles, soit en montrant les causes de certaines combinaisons et décompositions. Ses analyses d'eaux minérales ont conduit à des résultats analogues. Celles sur les cendres des végétaux et des terres végétales ont éclairé les problèmes fondamentaux de l'Agriculture rationnelle; aussi lui valurent-elles, en 1853, la grande médaille d'or à l'effigie d'Olivier de Serres de la Société impériale et centrale d'Agriculture de France. Par ses analyses sur les phosphates minéraux, il a été, dès 1818, un précurseur dans l'indication des niveaux phosphatés du gault et d'autres horizons géologiques. De ses analyses minéralurgiques, on a dit qu'il n'y avait pas une opération qu'il n'eût contribué à expliquer ou à perfectionner.